Portrait de l’UE : d’hier à aujourd’hui.

“Unie dans la diversité” ; c’est la devise actuelle de l’Union Européenne. Et elle résume assez bien ce qu’est l’organisation, qui compte 27 pays membres (depuis le Brexit de 2020), 24 langues officielles, et environ 447 millions de citoyens. Cette “UE” projette des valeurs communes, sur les plans économiques, politiques et sociaux.
Mais elle ne s’est pas installée ni imposée à l’Europe du jour au lendemain. Elle est le fruit d’un long parcours, de la fin de la Seconde Guerre mondiale à nos jours, autour des traités de Rome, de Schengen ou Maastricht qui définissent ses principes et son fonctionnement démocratique. Pourtant, si son poids historique est aujourd’hui un point fort, son futur n’est pas assuré et elle rencontre actuellement des problèmes qu’il est nécessaire de traiter.

Drapeau de l’Union Européenne – bercynumerique.finances.gouv.fr

Création de l’UE

Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, l’Europe est défigurée. Les combats ont donné lieu à des atrocités. Les dirigeants européens cherchent dès lors à établir des relations à travers une étroite coopération inter-Etats, pour que ce genre d’évènement ne se reproduise jamais.

C’est le Français Jean Monnet qui inspire l’idée d’une économie franco-allemande plus resserrée, pour l’industrie du charbon et de l’acier. Robert Schuman, ministre français des affaires étrangères et “père de l’Europe”, ainsi que Konrad Adenauer, chancelier de la République de l’Ouest, signeront le Traité de Paris en 1951, qui institue la Communauté Européenne du Charbon et de l’Acier. Cette CECA est la première organisation supranationale européenne.

Signature du Traité de Paris dans le Salon de l’Horloge du Ministère des Affaires étrangères français.

La CEE (pour Communauté Économique Européenne) lui succède en 1957 avec les Traités de Rome, signés par l’Allemagne, la Belgique, la France, l’Italie, le Luxembourg et les Pays-Bas. Ils instaurent notamment le marché commun européen par une union douanière (on peut le voir comme un pré-Schengen), appuyant fortement la coopération économique entre pays de la CEE. 

Cette “Europe unie” est poursuivie par le Président de la République François Mitterrand et son homologue le Chancelier allemand Helmut Kohl, avec les accords de Schengen. Ilssont signés en plusieurs temps : le premier accord est signé le 14 juin 1985 ; le second l’est cinq ans plus tard, à cause des problèmes que rencontre l’Allemagne. En effet, la chute du mur de Berlin et la réunification des deux Allemagnes accapare Helmut Kohl qui n’a plus autant de temps pour se consacrer à la future UE. 

Ces deux accords installent une coopération policière et judiciaire, mais surtout l’abolition des douanes intra-espace Schengen, autant pour les marchandises que pour les citoyens. Cela veut donc dire que l’on peut passer d’un pays signataire à l’autre sans devoir subir de contrôle. Si au départ Schengen est externe à l’UE, il sera ratifié à la Constitution de l’Union Européenne par le traité d’Amsterdam.

Signature du premier accord de Schengen sur le bateau Princesse Marie-Astrid ;
Secrétaires d’Etat aux Affaires étrangères présents (France, Allemagne et pays du Bénélux).

Le dernier accord majeur qui signe la création de l’Union Européenne en tant que telle est l’accord de Maastricht en 1992, qui édifie l’organisation en tant qu’unité politique, instaurant des valeurs sociales communes. Cette transformation de l’UE en entité politique s’inscrit dans le contexte de multipolarisation du monde des années 90. En effet, la guerre froide étant terminée, le système bipolaire (à deux pôles) soviético-étasunien n’est plus le “tout-puissant” et permet à de nouvelles sphères d’influence de se développer.

Fonctionnement de l’UE

L’UE s’est donc construite autour de points successifs. Mais aujourd’hui, telle qu’on la connaît, comment fonctionne-t-elle ?

Elle est le mélange de plusieurs institutions, qui usent d’outils démocratiques. Il y a quatre grands “sièges” du pouvoir de l’UE : le Parlement européen, la Commission européenne, le Conseil européen et le Conseil de l’Union Européenne. D’autres organes comme la Banque Centrale Européenne (BCE) ou la Cour de Justice de l’Union Européenne existent également, et toutes s’inscrivent dans la démocratie.

Premièrement, les 705 députés du Parlement européen sont élus pour 5 ans au suffrage universel direct : tout citoyen ayant la nationalité européenne et ayant le droit de vote dans son pays peut voter pour les élections du Parlement. Les différents députés élus sont membres de partis européens, comme “Identité et démocratie”, le groupe des “Verts/Alliance libre européenne”, le “Parti populaire européen” ou “Renew Europe”. Le Parlement européen englobe le pouvoir législatif puisqu’il vote les lois. 

Le bâtiment Louise Weiss, siège du Parlement européen à Strasbourg ; crédit : olrat/iStock.

Ensuite, le Conseil européen rassemble entre autres tous les dirigeants des pays de l’UE. Il prend généralement place trois à quatre fois par an ; les chefs d’Etat y décident de l’agenda politique de l’Union Européenne : quels sont les buts à atteindre ? Par quels moyens ? Le Conseil Européen donne donc la marche à suivre pour l’UE, sans pour autant proposer des lois.

Puis, la Commission européenne, qui est l’un des organes les plus importants : elle est constituée d’autant de commissaires que de pays de l’UE, et est actuellement dirigée par Ursula von der Leyen. Chaque commissaire représente un domaine d’action de l’organisation, appelé “portefeuille” (ils sont un peu comme des “ministres”, qui s’occupent d’un pôle à la fois). Ainsi, on retrouve un commissaire des transports, de la santé et la sécurité alimentaire, de l’économie, du marché intérieur, des partenariats internationaux… Ils ébauchent des lois pour répondre aux demandes du Conseil européen, et sont notamment responsables du pouvoir exécutif quotidien de l’UE.

Présentation des différents commissaires et les portefeuilles qu’ils présideront.

Enfin, le Conseil de l’Union Européenne, à ne pas confondre avec le Conseil européen, est composé des ministres des Etats-membres. Chaque rassemblement requiert la présence des ministres de tel ou tel ministère : écologie, éducation… Ensemble, ils peuvent proposer des lois qui seront par la suite discutées au Parlement.

L’Union Européenne est donc une institution démocratique qui repose sur différentes instances pour fonctionner. Les 27 pays membres y ont une voix égale, peu importe leur superficie, leur population, ou leur économie. 

Difficultés de l’UE

Aujourd’hui, elle doit faire face à plusieurs difficultés, dont la géométrie variable de ses paramètres. Car, pour entrer dans l’Union Européenne, il faut respecter un certain nombre de critères (le respect des droits de l’Homme, la liberté de la presse, l’abolition de la peine de mort, la séparation des pouvoirs (et de facto la démocratie), la protection des minorités…). Mais d’autres ne sont pas forcément imposés, et nous pouvons nous demander si cette variabilité ne va pas mener l’Union Européenne, dans un futur proche ou lointain, à la défaillance.

Tout d’abord, il faut nuancer ce qui a été précédemment dit sur l’espace Schengen : tous les pays de l’UE n’en font pas partie. Ce n’est pas le cas de la Croatie, la Bulgarie ou la Roumanie par exemple. Les contrôles douaniers y sont donc maintenus, autant pour les marchandises que pour les populations. A l’inverse, certains pays ne faisant pas partie de l’Union, comme la Norvège ou la Suisse, sont inclus dans l’espace Schengen, en raison de la première existence du traité (avant qu’il soit intégré à l’Union Européenne).

Cela pourrait être vu comme une faiblesse ; le politicien polonais Bronislaw Geremek avait dit, au sujet des accords de Schengen : “La suppression des frontières internes de l’Union Européenne, c’est la marque de la reconnaissance que tous les Etats concernés appartiennent au même espace, et qu’ils partagent une identité commune”. La non-application de Schengen provoque également une perte de l’efficacité du marché unique européen, pourtant l’une des véritables forces de l’UE.

Carte représentant l’Europe à travers de l’appartenance à Schengen.

L’Euro est aussi confronté à cette problématique de variabilité : en circulation depuis 2002, c’est la monnaie officielle des pays de l’Union Européenne… à quelques exceptions près. Seulement 19 pays membres (sur 27) l’utilisent au quotidien : les 7 pays restants (le Danemark étant exempt d’adopter l’Euro) ne remplissent pas les “critères de convergence” imposés par l’UE ; pour pouvoir adopter l’Euro, il faut que ces pays puissent répondre de certaines capacités, comme la stabilité économique ou la stabilité du taux de change. Cela permet d’assurer la protection de l’entièreté de la zone euro. Pourtant, comme pour Schengen, cette géométrie variable peut poser des problèmes d’insertion à l’UE, et entrave le fonctionnement du marché unique européen.

On peut aussi aller plus loin en affirmant que cette géométrie variable s’étend peu à peu aux valeurs défendues par l’UE, comme les Droits de l’Homme, ou même la démocratie. La cour de justice polonaise a, par exemple, en octobre 2021, déclaré la primauté du droit national polonais sur le droit européen. Une loi hongroise, qualifiée d’homophobe par une grande majorité d’Européens, a interdit la “promotion” et/ou la représentation de l’homosexualité et du mouvement LGBT+ auprès des mineurs.

Ainsi, l’Union Européenne s’est développée par un long parcours de traités et de lois, jusqu’à devenir celle que l’on connaît aujourd’hui. Elle défend des principes qui sont ancrés dans les mentalités européennes au travers de ses institutions. Cependant, des failles commencent à voir le jour, qui induisent une remise en cause, dans différents Etats-membres, de sa suprématie.

Bref, c’est une affaire à suivre.

Article par Nathan Luc – 21 Novembre 2022.

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